Besoin de musique

Naïssa se sentait tendue depuis le matin sans vraiment savoir pourquoi. Elle avait l'impression d'avoir accumulé le stress, les tensions depuis trop longtemps sans les avoir évacués. Il était grand temps qu'elle le fasse. Elle s'était donc dirigée vers le parc et y avait passé un long moment allongée dans l'herbe à observer le ciel, mais, contrairement à d'habitude, il n'y avait eu aucune amélioration. Elle qui avait souvent pu compter sur un peu d'air frais pour se sentir mieux se rendit alors compte qu'il fallait qu'elle utilise un autre moyen qu'elle n'avait pas utilisé depuis un bon moment.

Elle se releva donc en silence et retourna vers le château. Elle croisa quelques élèves qu'elle connaissait et les salua d'un signe de tête mais elle ne voulait pas s'attarder. Elle sentait ses émotions remonter d'un coup et il fallait qu'elle se dépêche de les évacuer si elle ne voulait pas devenir folle. Elle ne pouvait pas parler aux autres avant de l'avoir fait.

Elle se faufila donc entre les élèves, passant par un certain nombre de couloirs, le visage fermé. Personne ne vint la déranger ce qui la soulagea mais elle n'en était pas étonnée. Ils devaient comprendre à son expression qu'elle ne voulait surtout pas parler. Même les escaliers la laissèrent tranquille, l'aidant contrairement à d'habitude, à rejoindre la salle dont elle avait besoin.

Elle arriva enfin au couloir qu'elle cherchait. Elle passa 3 fois devant la tapisserie qui s'étalait sur le mur tout en pensant fort à ce qu'elle désirait trouver. Une porte apparut dans le mur. Elle s'approcha rapidement, ouvrit la porte et pénétra dans la salle. Sans prendre le temps de s'arrêter pour l'admirer, elle fonça vers le piano qui se situait en son centre, sentant son besoin de jouer devenir de plus en plus urgent. Celui-ci était magnifique et en d'autres circonstances elle serait certainement restée en admiration devant un bon moment avant d'oser l'approcher pour jouer.

Elle s'assit sur le tabouret qui se trouvait devant et respira un bon coup afin de se calmer un peu. Puis elle laissa ses doigts jouer une de ses mélodies préférées.

Elle se laissa envahir par la mélodie et oublia tout le reste. Ses tensions disparurent comme à chaque fois qu'elle jouait et son masque fermé se brisa. Le monde autour d'elle n'existait plus, il n'y avait qu'elle, le toucher du piano et la mélodie qu'elle jouait. Elle était tellement coupée du reste qu'elle n'entendit pas que quelqu'un pénétrait dans la pièce. Et puis, pourquoi s'en serait elle inquiétée alors qu'elle pensait avoir fermé la porte...

Naïssa avait senti par son lien que son jumeau savait qu'elle allait mal et elle sentait qu'il était nerveux à cause de cela. Elle aurait vraiment voulu se calmer pour qu'il ne soit pas mal à l'aise à cause d'elle mais elle n'y arrivait pas. Elle n'avait pas cherché à le rejoindre pendant la journée car elle ne voulait pas l'embêter avec ses histoires. Elle savait qu'il ne lui en voudrait pas le moins du monde si elle allait lui demander de l'aide mais elle n'arrivait pas à s'y résoudre. Elle avait à peine mangé au petit-déjeûner et ne l'avait donc pas vu dans la Grande Salle puis les cours étaient arrivés et elle avait supporté sans rien dire.

Elle avait senti son regard sur elle pendant tout le temps de leurs cours mais elle ne lui avait rien dit, totalement concentrée sur la maitrise de ses émotions. Il n'était bien sûr pas question qu'elle perde son contrôle en plein milieu des cours. Elle avait senti son inquiétude se renforcer pendant la journée mais ils ne s'étaient pas vus.

Elle savait que si ils n'avaient pas eu cours, il serait venu la voir dès le début de la journée et ne l'aurait pas lâchée tant qu'elle n'allait pas mieux. Il ne venait pas toujours la voir lorsqu'elle se sentait fatiguée ou triste car il ne pouvait pas non plus être avec elle 24h/24 lorsqu'ils étaient à Poudlard. Elle avait refusé, dès leur arrivée à l'école de magie, qu'il se porte à son secours à chaque fois. Elle ne voulait pas qu'il se retrouve sans véritables amis juste parce qu'il devait être présent pour elle.

Elle se débrouillait donc pour limiter les occasions pour lui. Mais là, il devait avoir senti que ce n'était pas une simple petite fatigue passagère. Elle ne pouvait pas lui cacher qu'elle se sentait vraiment mal car leur lien ne le permettait pas. De toute façon, même si cela avait été possible, il l'aurait compris en la voyant pendant les cours. Il savait lire ses émotions sans problèmes maintenant.

Totalement absorbée par la musique, elle ne remarqua pas qu'il se dirigeait vers elle et ne l'entendit pas non plus entrer dans la salle sur demande et fermer la porte derrière lui. Les yeux mi-clos, une esquisse de sourire aux lèvres, elle se laissait aller à ce sentiment de détente qu'elle ressentait trop rarement à son goût. Bien que le morceau soit doux et envoutant, elle arrivait à y exprimer toutes ses émotions. En premier venait une certaine colère, tempérée par une tristesse profonde mais masquée par d'autres émotions variées comme la joie, le calme, l'amour...

Elle laissait passer ses émotions mais aussi toutes celles qu'elle avait perçues grâce à son don. Toutes ces émotions qui bien que ne lui appartenant pas faisaient partie d'elle désormais. Le piano était un moyen qu'elle avait trouvé assez jeune et qui lui permettait de se débarrasser des tensions causées par le trop plein d'émotions qu'elle ressentait par moment à cause de son don.

Elle entama la dernière partie du morceau, les yeux fermés, ses épaules se soulevant et s'abaissant encore de façon irrégulière et saccadée. Malgré la musique, elle sentait encore des tensions l'habiter. Le tourbillon d'émotions en elle la troublait, semant la confusion dans son esprit.

Elle relâcha la pression sur les touches du piano, terminant ainsi le morceau. Elle ressentit alors immédiatement des bras l'enlacer. En temps normal elle aurait sursauté et se serait retournée vivement pour savoir qui était là mais elle avait tout de suite senti que c'était son jumeau. Elle posa donc sa tête contre son torse, les yeux fermés. Après un instant, elle se leva pour venir se blottir dans ses bras.

C'était exactement ce dont elle avait besoin en ce moment, de l'affection de son frère. Elle se laissa aller complètement, s'abandonnant à son étreinte.